Quand la réserve fractionnaire n’est pas une fraude…

L’histoire regorge de surprises. Les textes conventionnels racontent que les orfèvres du 17ème siècle livraient des certificats de dépôts pour chaque once d’or déposé. Le certificat de dépôt circule à sa valeur faciale, ou plutôt, il est dit que le déposant est “propriétaire” des onces qu’il a déposées. On nous raconte ensuite que petit à petit, les orfèvres remarquèrent que les paiements en or ne représentaient finalement qu’une petite fraction du stock total. Un jour l’orfèvre eut la pensée suivante : “mon coffre-fort contient actuellement 2000 onces d’or. Mes paiements quotidiens s’élèvent à 100 onces d’or, ni plus ni moins. Si je le voulais, je pourrais dès maintenant prêter plus de la moitié de l’or que j’ai en stock. Il m’en restera largement assez pour honorer mes engagements auprès de mes clients. Et personne ne verra la différence.”
Les déposants ne seraient alors aucunement au courant de ces pratiques. Et s’il n’y a pas de consentement, on peut effectivement parler d’une fraude.

Les débuts de la réserve fractionnaire en Angleterre coïncide avec l’apparition des intérêts sur les dépôts et la disparition des prélèvements sur les détenteurs de billets et de dépôts. En fait, ces innovations ne furent possible que dans la mesure où les banquiers étaient autorisés à tirer profit des pièces d’or qui leur étaient confiées, mais ce bénéfice profitait aussi aux déposants. Les clients étaient conscients qu’une partie seulement de leur avoirs repose sur de l’or véritable, mais ils préféraient recevoir des intérêts sur les dépôts plutôt que d’avoir à payer les frais d’entreposage.
Ce constat est attesté par les écrits de Samuel Pepys. Dans son journal, Pepys raconte qu’il avait déposé son or (2000£) dans la banque de Sir Robert Viner. Le 30 Mars 1666, il retourne chez Viner pour lui informer que le lendemain il souhaitera retirer ses avoirs en monnaie. Pepys note que son banquier lui a payé 35£, soit l’équivalent d’un taux annuel de 7%. Août 1666, il note avec surprise que la Banque d’Amsterdam ne paie jamais d’intérêts à qui que ce soit.
Au fond, il n’y a rien d’étonnant. L’inspection et le tri des pièces coûtent cher.

Historiquement, les banques n’ont jamais prétendu que les prêts étaient soutenus à 100% par des réserves d’or. Elles livraient simplement des promesses de remboursements, des IOUs (I owe you).
Il n’est pas certain que l’histoire atteste de ces accusations tant les autres plaintes étaient abondantes. Vraisemblablement, il n’y aurait pas de preuves que les gens se soient plaints auprès des banquiers d’avoir prêté plus d’argent qu’ils n’en possèdent.
Sir Dudley North, par exemple, fait une confusion dans le sens du mot “dépôt” quand il suppose que celui-ci est confié au dépositaire et non transmis. Faire un dépôt n’indique pas que le dépositaire doit le garder en main propre.

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